Partenariats européens

Calcul haute performance : Inria impliqué dans huit projets européens

Date:
Mis à jour le 04/08/2022
Les équipes Inria ont répondu avec succès aux deux derniers appels à projets européens EuroHPC, en 2020. Celles-ci participeront en partenariat avec d’autres acteurs à huit des projets retenus. Elles vont travailler sur des algorithmes d’ordonnancement pour le HPC, du stockage, des supports d’exécution, des modèles de simulation du cœur humain. Et contribuer ainsi à la stratégie de l’Europe, qui veut créer d’ici quelques années un écosystème de calculateurs de classe mondiale.
Illustration HPC

Calcul haute performance : une priorité pour l’Union européenne

Parce qu’il propulse la puissance des ordinateurs à des niveaux jamais atteints, le calcul haute performance (HPC) est devenu en quelques années un sujet prioritaire pour la plupart des États. « On évoque ici et là des calculateurs dits "exascales", capables d’effectuer un milliard de milliards d’opérations à la seconde, illustre Emmanuel Jeannot, délégué scientifique d’Inria Bordeaux – Sud-Ouest. C’est deux fois plus que la machine la plus puissante du monde à ce jour, et vingt fois plus que la meilleure machine européenne. » Cette extraordinaire capacité permettrait de résoudre par la simulation des problèmes insolubles aujourd’hui, par exemple en mécanique des fluides, dans les domaines médical, de la météo, du climat, etc., et de perfectionner encore l’analyse de données, notamment via les outils d’intelligence artificielle.

Les enjeux sont tels que l’Union européenne a mis sur pied avec des États-membres et des partenaires privés une initiative conjointe baptisée EuroHPC. Elle cofinance de la recherche de pointe sur le développement, le déploiement et la maintenance de supercalculateurs européens de classe mondiale. Inria a participé à ses deux derniers appels à projets, en janvier et juillet 2020 : il est partenaire de huit des projets retenus.

Les huit projets retenus

EuroHPC a sélectionné huit projets de recherche dont Inria est partenaire.

  • ACROSS : il développera une plate-forme cross-stack HPC, Big Data et IA vers l’exascale.
    • Équipe Inria impliquée : Kerdata
       
  • ADMIRE : il développera un gestionnaire de données pour le stockage sur les machines parallèles.
    • Équipe Inria impliquée : Tadaam
       
  • eFlows4HPC : il travaillera sur l'activation de flux de travail dynamiques et intelligents dans le futur écosystème EuroHPC.
    • Équipe Inria impliquée : Cardamom
       
  • MICROCARD : il porte sur la modélisation et la simulation numérique de l'électrophysiologie cardiaque à l'échelle cellulaire.  
  • REGALE : il concerne le management de ressources pour l’exascale.
    • Équipe Inria impliquée : Datamove
       
  • TEXTAROSSA : il vise à développer des technologies matérielles et logicielles et des accélérateurs pour les applications de calcul intensif.
  • EUPEX (en cours de contractualisation) : il conçoit, construit et valide la première plate-forme HPC intégrant la technologie européenne de processeur à usage général (EPI), la technologie d'interconnexion européenne (BXI) et une pile logicielle européenne pour le HPC.  
  • HPCQS (en cours de contractualisation) : il vise à préparer la recherche, l'industrie et la société européennes à l'utilisation et au fonctionnement fédéral des ordinateurs quantiques et des simulateurs.

Onze équipes Inria impliquées dans six centres régionaux

« Le taux moyen de succès à ces appels est faible ; nous sommes d’autant plus heureux d’avoir enregistré un tel score, souligne Lucia Marta, chargée des partenariats et des projets d’innovation européens à Bordeaux. Pour en arriver là, Inria a beaucoup sensibilisé et accompagné les chercheurs dans leurs soumissions de candidatures. Car répondre à ces appels est plus lourd et complexe que de solliciter un financement national. Il faut trouver les meilleurs partenaires, monter un consortium européen, préparer un dossier en anglais, anticiper de plusieurs mois… »

Les huit projets EuroHPC dans lesquels Inria est impliqué mobilisent au total onze équipes issues de six centres régionaux. Bordeaux – Sud-Ouest, très actif en HPC, joue un rôle prépondérant avec cinq équipes présentes dans six projets. Dans chaque consortium, les chercheurs Inria travailleront en lien étroit avec des spécialistes du matériel.

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Portrait Emmanuel Jeannot
Verbatim

Nous visons de tels niveaux de performance qu’il faut aborder conjointement les aspects matériels et logiciels à travers des démarches de coconception. Un exemple : les supercalculateurs sont si gourmands en énergie que leur consommation doit progresser beaucoup moins vite que leur puissance de calcul. Or, cela dépend des choix d’architecture mais aussi du pilotage logiciel de la gestion de l’énergie ou des transferts des données. Tout est imbriqué.

Auteur

Emmanuel Jeannot

Poste

Délégué scientifique d’Inria Bordeaux – Sud-Ouest

Un véritable continuum de recherche sur le HPC

La forte présence d’Inria reflète l’existence en son sein d’une palette de compétences qui couvre l’ensemble des aspects logiciels du HPC. Cette stratégie de recherche, présente en particulier au centre Bordeaux – Sud-Ouest, permet de faire collaborer différentes équipes pour traiter un continuum de sujets complexes. C’est un passage obligé vers une souveraineté française ou européenne en calcul haute performance.

Ces projets EuroHPC permettront en premier lieu à Inria de développer des algorithmes d’ordonnancement chargés de gérer les ressources matérielles. Sur des machines HPC dotées de dizaines de milliers de cœurs de calcul, leur rôle est essentiel. Il faut les concevoir et au préalable, les modéliser pour s’assurer qu’ils présenteront les propriétés de fonctionnement voulues.

En second lieu, second domaine, la gestion des données. Le HPC travaille si vite qu’il est difficile d’acheminer les données d’entrée et d’archiver les résultats à un rythme suffisant. Faute d’optimisation, ces deux étapes peuvent devenir des goulots d’étranglement et pénaliser les performances.

La recherche Inria sur le HPC couvre aussi, en troisième lieu, les supports d’exécution, chargés d’implanter les algorithmes. Ils orchestrent le parallélisme des calculs et font dialoguer entre eux les processeurs, qui ne sont pas forcément identiques : pour l’un des projets retenus, le supercalculateur pourrait combiner des produits standard et des accélérateurs de carte graphique, bien adaptés aux tâches d’intelligence artificielle.

Supercalculateur exascale : jusqu’à un million de cœurs de calcul

À côté des chercheurs en informatique, Inria compte des spécialistes en mathématiques appliquées capables de développer des outils de simulation. « Modéliser des écoulements aérodynamiques ou le fonctionnement du muscle cardiaque à l’échelle de chaque cellule relève d’une expertise scientifique de haut vol, souligne Emmanuel Jeannot. Ce sont ces outils applicatifs qui en fin de compte, donnent au HPC sa raison d’être. »

Même si l’ambition d’EuroHPC porte sur des infrastructures de calcul exascales, Emmanuel Jeannot reste prudent :

Une telle machine occuperait plusieurs centaines de mètres carrés au sol, totaliserait environ un million de cœurs et nécessiterait chaque année un budget électricité de vingt millions d’euros. On n’en construira sans doute que quelques exemplaires ; les supercalculateurs de taille plus modeste seront les plus nombreux. Ce qui n’enlève rien à l’urgence des travaux sur leurs architectures matérielles, leurs logiciels machines et leurs applicatifs, qui s’attachent aussi à leur cas.

Un choix de processeurs encore incertain

De plus, il existe des incertitudes sur certains choix techniques, par exemple les processeurs. Intel domine le marché, mais son concurrent ARM propose des produits plus simples spécialisés dans le HPC. La Chine, privée de ces technologies par l’embargo américain, conçoit ses propres processeurs. Or, ces trois options impliquent des solutions logicielles différentes.

Les huit projets EuroHPC démarrent selon les cas en 2021 ou en 2022, pour une durée de 36 à 48 mois. Sans préjuger de leurs résultats, Inria peut se réjouir d’avoir progressé sur un point de son contrat d’objectifs et de performances avec ses tutelles : la montée en puissance de ses projets collaboratifs européens à fort impact économique et sociétal.

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