Europe

La perception des humains virtuels est influencée par leur façon de bouger

Date:
Mis à jour le 29/09/2022
De nos jours, les avatars peuvent sembler très réalistes. Pourtant, les designs actuels ne sont pas toujours adaptés à des applications autres que le divertissement. Ils peuvent parfois même recevoir une mauvaise évaluation de la part des utilisateurs. Le problème ne réside peut-être pas tant dans la représentation visuelle en soi, mais plutôt dans la façon de bouger qu’ont les personnages.
Immermove - Plate-forme de réalité virtuelle, Campus de Ker Lann, ENS Rennes : étude des mouvements de foule.
© Inria / Photo C. Morel

 

Katja Zibrek, chercheuse chez Inria, a reçu une bourse des Actions Marie Skłodowska-Curie pour étudier comment le mouvement influence réellement notre perception du réalisme des humains virtuels.

« Lorsqu’il s’agit de créer des personnages réalistes dans des environnements virtuels, les membres de notre communauté se concentrent souvent sur la manière de représenter les mouvements du visage pour qu’ils semblent naturels. Ils ont cependant tendance à ne pas accorder trop d'attention aux mouvements de l'ensemble du corps. C’est à cela que je m’intéresse, car j’ai l’impression que ce sujet n’est pas suffisamment étudié » résume Katja Zibrek, membre de la future équipe de recherche VirtUS au centre Inria de l'université de Rennes. Ayant suivi une double formation en informatique et en psychologie, elle étudie la manière dont le réalisme de l'apparence des personnages virtuels guide la perception et le comportement du spectateur. Elle s’est vu accorder récemment une bourse individuelle MSCA pour un projet de deux ans intitulé « ForEVR », dont l’objectif est précisément d’étudier plus en détail l’attrait du mouvement des personnages.

drapeau européen

 

Les actions Marie Skłodowska Curie (MSCA) sont le programme de référence de l'Union européenne pour la formation doctorale et postdoctorale des chercheurs.

Inria offre de nombreuses opportunités et un support dédié pour accueillir, dans ses neuf centres, des postdoctorants et postsdoctorantes dans le cadre de ce programme.

► En savoir plus sur les MSCA

« Nous avons une certaine idée de ce à quoi ressemblerait un mouvement plaisant. Des recherches antérieures nous ont montré que cela joue sur la façon dont les gens se comportent. C'est un signifiant très fort, mais nous ne le comprenons pas très bien. Ce n'est pas un sujet dont on parle beaucoup. Probablement parce que c’est très difficile à quantifier. »

D’où la nécessité de mettre au point des méthodes et des mesures permettant de quantifier de manière fiable les changements dans le mouvement. « Par exemple, si nous appliquons un changement à un personnage, les gens vont-ils y réagir ? Vont-ils même remarquer le changement ? Le projet devrait révéler ce type d’indicateurs. »

 

Un mouvement pour une émotion

Le principal défi sera toutefois « d’en arriver au stade où nous pourrons changer le mouvement de manière significative, afin que les gens le perçoivent comme nous le souhaitons. Nous cherchons à créer des mouvements présentant des qualités différentes. »

VirtUS est une future équipe projet Inria, Université Rennes 2, Université Rennes 1 et ENS Rennes, en commun avec l’Irisa.

 

En fin de compte, cela reviendrait à avoir des filtres de mouvement qui transmettent toute une gamme d'états d'esprit émotionnels. « Vous enregistrez un mouvement qui est naturel. Puis vous appliquez l'algorithme et vous modifiez ce mouvement d'une manière, disons, plus névrotique. Le personnage est alors perçu comme ayant une autre personnalité. C’est très utile car pour ce faire, il n’est pas nécessaire d'enregistrer de nombreuses motions. Il suffit d'en enregistrer une que l'on peut ensuite modifier. »

Cerise sur le gâteau : cette modification pourrait même être effectuée en temps réel. Dans la pratique, une telle technologie pourrait aider de nombreux chercheurs dans de divers domaines, qui ne peuvent pas facilement accéder à un système de capture de mouvement efficace (et coûteux).

Photographie de Katja Zibrek et Yuliya Patotskaya présentant une démo de réalité virtuelle lors du salon du laval virtual
@Inria

Réhabilitation psychologique

Les algorithmes qui devraient résulter de cette recherche seront transférés à Virtual Bodyworks. Spin-off de l’université de Barcelone, cette entreprise est spécialisée dans les environnements immersifs axés sur la réhabilitation médicale et psychologique. L'un de leurs protocoles innovants exploite la réalité virtuelle (RV) pour la réadaptation des auteurs condamnés de violences domestiques. « Les agresseurs sont mis dans la peau d'une femme harcelée ou agressée par un homme. Ils peuvent ainsi se rendre compte de ce que l’on ressent lorsqu'on est soi-même victime de tels abus. Le but est de renforcer leur empathie envers les victimes. » Ces recherches cliniques ont été financées ces dernières années par plusieurs projets européens, dont VR per GENERE. Les expériences en cours sont menées par l'hôpital Clínic de Barcelone, en collaboration avec le département catalan de la Justice. « Plus généralement, les techniques d'incarnation sont de plus en plus envisagées pour traiter divers troubles de la santé mentale. Elles pourraient contribuer à améliorer la confiance en soi des personnes, par exemple. » Une autre initiative intéressante dans ce contexte est celle de Socratres : une plate-forme de RV qui exploite l'incarnation pour traiter l'obésité.
 

Titre

Une étape importante sur le plan personnel

Image
Portrait de Katja Zibrek
Verbatim

Jusqu’ici, j’avais toujours travaillé au sein d’une équipe. C’est la première fois que je mène seule un projet de recherche. C’est mon projet, ma responsabilité. J'ai aussi une responsabilité envers un étudiant. Mais après tout, donner des moyens d'action aux jeunes chercheurs, c'est précisément la raison d'être d'une bourse d'actions Marie Skłodowska-Curie.

Auteur

Katja Zibrek

Poste

Porteuse du projet ForEVR