La ministre des Armées fait de l'intelligence artificielle une priorité stratégique de la défense nationale

Date:
Mis à jour le 15/11/2022
Vendredi 5 avril, le centre de recherche Inria Saclay – Île-de-France a accueilli la visite de Madame Florence Parly, ministre des Armées, qui a dévoilé la stratégie du ministère en matière d’intelligence artificielle. Bruno Sportisse, Président-directeur général d’Inria, Jean-Yves Berthou, directeur du centre, et Bertrand Thirion, directeur par intérim de l’Institut de Convergences DATAIA , lui ont présenté un panel des dernières technologies développées par les membres partenaires de l’institut.

 

Parly
Photo V. BESNARD - Ministère des Armées

À l’occasion de la venue de Madame la ministre des Armées pour présenter la stratégie du ministère en matière d’intelligence artificielle (IA), de nombreux partenaires de l’Institut DATAIA lui ont présenté des technologies innovantes autour de 3 thématiques :

  • Intelligence artificielle et gestion de l’information ;
  • Intelligence artificielle et interactions ;
  • Intelligence artificielle et technologies embarquées.

La gestion de l’information

L’IA et la science des données permettent de représenter les connaissances humaines, en créant des modèles du langage humain et en reliant des entités qui apparaissent associées dans de grands corpus de textes. Ceci permet de tester automatiquement l’authenticité d’une affirmation.

Comment savoir si on peut faire confiance à une information ? Comment le faisons-nous dans la vraie vie ? La confiance au quotidien est accordée sur la base de « qui nous dit cela »,et de « ce que l'on sait par ailleurs » de la source d'une information. En collaboration avec l'équipe "fact-checking" du journal Le Monde , l’équipe Cedar a conçu le système ConnectionLens pour découvrir et analyser les liens (sociaux, de collaboration, ...) entre des personnes et des organisations, liens glanés à travers des sources de données disparates. Une telle analyse permet par exemple d'identifier des liens ou conflits d'intérêt entre différents acteurs, ou d'interpréter leurs propos par le prisme de leurs affiliations et intérêts économiques.

YAGO est une base de connaissance, autrement dit il s’agit d’une collection de données sur le monde qu’un ordinateur peut « comprendre » . Elle contient 10 millions d’entités (telles que des villes, des personnes de la vie publique, ou des organisations), et plus de 100 millions de faits sur ces entités (qui est né où, quel acteur joue dans quel film, etc). YAGO était une des premières bases de connaissances, et elle a à ce titre gagné le « Test of time award » de la conférence WWW 2018 (la plus grande conférence mondiale dans le domaine du Web).

Aujourd’hui, les bases de connaissances sont utilisées dans les moteurs de recherche ainsi que dans des applications d’IA. YAGO , par exemple, est utilisé dans le célèbre système IBM Watson .   

Les interactions

Concevoir des modes d’interaction enrichis entre les humains et les systèmes d’intelligence artificielle est un enjeu fondamental. Mais comment améliorer notre utilisation de ces interfaces ? Et existe-t-il des risques de manipulation de l’humain ?

Les objets connectés et notamment les agents conversationnels (comme Google Home par exemple) apportent une nouvelle dimension dans l’interaction entre humains et systèmes et pourraient devenir un moyen d’influence des individus. Ils ne sont pour l’instant ni régulés, ni évalués et très opaques.

En se basant sur l’étude des« nudges », techniques étudiées pour modifier le comportement des personnes, l’équipe de recherche de Laurence Devillers « Dimensions affectives et sociales dans les interactions parlées » met en lumière le danger que peuvent représenter ces techniques pour des personnes vulnérables comme les enfants ou les personnes âgées. 

La démonstration a pour but de présenter l'état de l'art en matière de traitement automatique de la parole conversationnelle multilingue pour la défense, qu'il s'agisse de sécurité, de renseignement, ou d'interface humain-machine. Un grand bond a été observé ces dernières années sur la qualité de la reconnaissance vocale en particulier grâce à la mise en œuvre de réseaux de neurones profonds.

Les applications de la défense ne bénéficient pas de ces progrès, à cause des environnements difficiles (bruits, stress, accents, langues rares, phraséologie spécifique,...) Pourtant il est aujourd'hui possible, grâce à l’IA, de s'attaquer à ces problèmes de reconnaissance de la parole. 

Les technologies embarquées

Le monde de l’IA ne se résume pas à de grandes plates-formes de calcul : de nombreuses applications nécessitent un calcul décentralisé, exécuté sur des dispositifs légers. Par exemple, pour calculer la position d’un agent sans GPS ou analyser un flux d’images sur des dispositifs compacts.

Le CEA List développe des solutions d’IA permettant d’assurer de hautes performances (puissance de calcul, faible consommation, faible volume) aux systèmes embarqués (véhicules autonomes, capteurs intelligents, etc..).  Par exemple, l’outil N2D2 développé au CEA List permet, dans un contexte de développement d’un système d’apprentissage profond permettant à un véhicule d’analyser son environnement en opérant une reconstruction 3D, de gagner un ordre de grandeur en consommation en générant du code optimisé pour des architectures embarquées. Ces outils permettent aussi, par exemple d’effectuer la labellisation (détection véhicules, bateaux, piscines, …) en temps réel (120 images par seconde) d’images aériennes.

Afin de gagner encore en efficacité, et de conserver une capacité de souveraineté, le CEA List a la capacité de développer des accélérateurs matériels consommant 200 fois moins que des GPUs embarqués pour des tâches de reconnaissance d’image (« PNeuro  »), ou encore d’exploiter les technologies avancées du CEA Leti en développant par exemple une rétine intelligente, capable de traiter seule des images et cela jusqu’à 5000 fois par seconde. Ces diverses solutions sont déjà mises en œuvre chez les partenaires industriels du CEA.

  • BlueForce for soldiers : géolocalisation piéton en conditions de déni GPS notamment à l'intérieur des bâtiments par Thomas Bonis, Inria

La localisation d'un piéton en conditions de déni GPS est un enjeu critique pour les applications de défense pour donner l'accès à une situation tactique et permettre le secours des personnes. Dans le cadre de primo-intervenants comme des soldats ou des pompiers, la localisation d'un piéton doit être immédiate sans installer d'infrastructure et sans pénaliser la mission de l'agent . Le capteur qui remplit cette mission pour les applications lourdes de défense est une centrale inertielle.

Grâce à une innovation de rupture - la navigation magnéto-inertielle développée par l'entreprise Sysnav - et grâce à des algorithmes de reconnaissance de mouvement développés par l’équipe DataShape d’Inria, l'entreprise Sysnav a pu maquetter une solution de localisation unique basée sur des capteurs à bas coûts et peu encombrants qui permet de répondre aux contraintes opérationnelles des primo-intervenants . Le challenge MALIN organisé par la DGA et l'ANR pour lequel Sysnav et DataShape / Inria ont été retenus est le cadre dans lequel les travaux sont menés pour travailler sur cette solution. Le marché d'appui de l'entreprise pour déployer cette technologie est aujourd'hui le marché médical avec la mesure de paramètres de trajectoire dans le cadre des essais cliniques pour l'évaluation d'efficacité lors de la mise au point de nouvelles molécules. 

 

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