Handicap

Conférence - Le bégaiement : définition, description, défis

Date:
Mis à jour le 22/05/2024
Le cycle de conférences « Handicap & numérique » propose tous les mois un focus sur des travaux de recherche, menés au sein de l’institut, pour favoriser l’inclusion. Visionnez dès maintenant le replay de la dernière conférence qui aborde quelques-uns des défis scientifiques restants à relever sur le bégaiement.
Handicap & numérique, cycle de conférences. Pour favoriser l'inclusion.

Un trouble multifactoriel mêlant neurologie et génétique

Le bégaiement est un trouble de la fluence qui se caractérise par des interruptions momentanées et involontaires du flux de parole. Ces altérations de la chaine parlée prennent la forme de prolongations de son, de blocages silencieux et de répétitions de phonème, de syllabe, de mot... pouvant avoir des répercussions sur le plan psychologique (gêne, frustration...) et sur la vie des personnes qui en souffrent. Si l'origine du bégaiement n'est pas encore totalement connue, l'on sait aujourd'hui qu'il s'agit d'un trouble multifactoriel mêlant des considérations neurologiques et génétiques

Les recherches actuelles sur ce trouble sont variées et concernent plusieurs disciplines. Elles portent sur les causes de ce trouble, sur le repérage des populations les plus à risque, sur sa prise en charge, sur la description de l'activité motrice durant les disfluences et sur la détection automatique de ces dernières. 

Fabrice Hirsch est Professeur des Universités en sciences du langage à l'Université Paul-Valéry Montpellier 3. Il est actuellement le directeur de l'UMR Praxiling et est spécialiste du bégaiement. Il est le porteur du programme ANR BENEPHIDIRE (Le bégaiement : la neurologie, la phonétique et l'informatique pour son diagnostic et sa rééducation). 

Slim Ouni est Professeur des Universités en informatique à l'Université de Lorraine. Il est actuellement responsable de l'équipe Multispeech. Sa thématique de recherche porte sur l’étude de la parole multimodale, sa production et sa génération.

Replay de la conférence

Comment se caractérise le bégaiement et quels sont les facteurs influençant ce trouble ?

Le bégaiement est un trouble neurologique qui se caractérise par la présence d'interruptions du discours, que l'on appelle des disfluences. Ces disfluences peuvent prendre différentes formes, comme une prolongation de son, des répétitions de partie de mot voire de mot(s) et/ou un blocage silencieux. Il est important de noter que ces accidents de parole ne sont pas dus à une hésitation sur la suite du discours mais qu'ils sont liés à une perte momentanée du contrôle de certains muscles utilisés pour produire de la parole. C'est ce qui les distingue des interruptions du discours présentes chez des locuteurs normo-fluents. La sévérité du bégaiement n'est pas la même d'une personne à l'autre et varie en fonction de différents paramètres : stress, fatigue, charge cognitive trop élevée, interlocuteurs... Il faut savoir également que le bégaiement peut être à l'origine d'un certain nombre de sentiments négatifs chez les personnes qui en souffrent (frustration, gêne, peur de prendre la parole…)

Quels sont les défis scientifiques auxquels s’attaque le projet BENEPHIDIRE ?

Financé par l'Agence Nationale de la Recherche, le projet BENEPHIDIRE a l'objectif de contribuer à mieux comprendre les causes neurologiques du bégaiement, en se focalisant sur le Faisceau Frontal Aslant, un faisceau de substance blanche qui interconnecte la partie postérieure du gyrus frontal inférieur à l'aire et à la pré-aire motrice supplémentaire au niveau cérébral. Nous cherchons à évaluer son rôle dans la gestion de la fluence de la parole. Le projet vise également à décrire, d'un point de vue moteur, ce qui se passe sur le plan articulatoire, pendant les disfluences. Nous suivons ainsi les mouvements et la vélocité de la langue, des lèvres, de la mandibule... pendant les accidents de parole. Enfin, BENEPHIDIRE dispose également de problématiques liées aux sciences du numérique.  

Plus globalement, quels peuvent être les apports des sciences du numérique dans les recherches actuelles autour du bégaiement ?

Les sciences du numérique peuvent être utiles à plus d'un titre dans les recherches sur le bégaiement. Tout d'abord, elles doivent permettre d'améliorer la reconnaissance automatique de la parole bègue. En effet, si l'on prend le cas des assistants vocaux, ils ne sont actuellement pas suffisamment adaptés à la prise en compte du bégaiement, raison pour laquelle ils dysfonctionnent lorsqu'un bégaiement est sévère. De même, les sciences du numérique devraient pouvoir permettre de contribuer à l'évaluation ou à l'auto-évaluation de ce trouble. Un algorithme fiable de détection et de classification automatiques des disfluences pourrait par exemple permettre de calculer simplement un taux de fluence. Ce type d'information serait utile pour quantifier la sévérité d'un bégaiement, suivre son évolution et identifier les difficultés d'un locuteur.