Jumeau numérique

Vidium : l’innovation au service de la santé et de la médecine personnalisée

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Mis à jour le 15/07/2021
Jeune startup lyonnaise créée fin 2018 avec le soutien d’Inria, Vidium développe des jumeaux numériques en biologie cellulaire, une innovation en partie issue du monde industriel, qu’elle propose aux acteurs de la recherche publique et privée dans le domaine de la santé et de la médecine personnalisée.
Illustration : hélices d'ADN dans une main avec des équationsUTILISATION STRICTEMENT INRIA, NE JAMAIS TRANSMETTRE A UN TIERS QUELQU'EN SOIT LA RAISON !!
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Une startup née de la rencontre de personnalités complémentaires

Née en décembre 2018 de la rencontre d’Arnaud Bonnaffoux, ingénieur et chercheur, et Sami Bou-Antoun, médecin et entrepreneur, et soutenue à sa création par Inria, Vidium vient de réaliser une importante levée de fonds (plus d’un million d’euros) pour développer son activité. Basée à Lyon, dans les locaux de l’École normale supérieure (ENS de Lyon), cette startup titulaire des labels Deeptech et French Tech Seed emploie huit salariés à temps plein. Elle est spécialisée dans la conception, le développement et l’exploitation de logiciels et de solutions algorithmiques appliquées aux domaines de l'ingénierie et des sciences du vivant.

Pour ses deux fondateurs, une nouvelle page de l’aventure engagée il y a trois ans vient de se tourner, mais tout a commencé quelques années auparavant, en 2015, avec un projet d’Arnaud Bonnaffoux : « Après une formation d’ingénieur en aéronautique et dix années passées dans ce secteur industriel, au sein de Thales Avionics, j’ai engagé une démarche de reconversion professionnelle ». Reprenant pour un temps le chemin des études dans le cadre d’un congé individuel de formation, cet ingénieur diplômé de Supaéro se tourne vers la biologie. Il obtient un master en biologie moléculaire à l’université de Toulouse, puis travaille pendant trois ans dans le cadre d’un doctorat en convention CIFRE chez Cosmotech (startup du numérique, émanant de l’ENS Lyon), avec un partenariat entre le Laboratoire de biologie et modélisation de la cellule (LBMC)* et l’équipe-projet Dracula**, du centre Inria Grenoble – Rhône-Alpes.

Dans mes recherches doctorales, j’ai appliqué des techniques de modélisation et de simulation numériques, très utilisées dans l’industrie, afin de répondre à des problèmes posés en biologie cellulaire, en particulier pour comprendre certains mécanismes de différenciations cellulaires, impliqués par exemple dans des maladies dégénératives, explique Arnaud Bonnaffoux.

Une innovation : le jumeau numérique de cellules vivantes

Au cœur de ces modélisations innovantes, figure le "jumeau numérique". Représentation informatique d’un système complexe – écosystème, machine, climat, corps humain, etc. –, un jumeau numérique est un outil d’aide à la décision. En se fondant sur des simulations réalistes, il permet de répondre à des questions prospectives et de guider la prise de décision d’un expert (médecin, ingénieur, dirigeant, etc.).

« Les jumeaux numériques sont construits à partir de données, qui donnent des informations quantitatives sur le système concerné, et des modèles mathématiques, qui synthétisent les connaissances qu’en ont les experts (médecins, biologistes, chimistes, etc.) », éclaire Arnaud Bonnaffoux. Des données seules, même en grand nombre, ne permettent que de décrire un système complexe, sans pouvoir prédire son évolution. Complétées par des modèles mathématiques, ces données peuvent devenir prédictives.

Dans l’industrie aéronautique, j’ai utilisé et développé des jumeaux numériques, par exemple pour concevoir des pilotes automatiques, précise Arnaud Bonnaffoux. J’ai appliqué ces technologies à des ensembles tout aussi complexes, comme les réseaux génétiques, afin de simuler leurs interactions et comprendre les conséquences induites par une mutation génétique.

Une convergence de technologies

Si les recherches d’Arnaud Bonnaffoux sur les jumeaux numériques en biologie ont attiré l’attention de Sami Bou-Antoun, expert en immunologie et conseiller en innovation, cela n’est pas un hasard.

La recherche en génétique fonctionne comme en "boîte noire", explique-t-il. Les scientifiques connaissent en effet les états "sain" et "pathologiques" des cellules… mais ils ne comprennent pas encore en détail les mécanismes en jeu lors du développement d’une maladie d’origine génétique. 

Les jumeaux numériques permettent d’étudier ces mécanismes, parce que les simulations qu’ils autorisent sont fondées sur des modèles reproduisant la réalité biologiqueLes modélisations proposées par Arnaud offrent de plus la possibilité de rendre compte de processus "stochastiques", c’est-à-dire aléatoires : les mécanismes d’expression des gènes, que les scientifiques souhaitent comprendre, sont en effet de nature aléatoire, détaille Sami Bou-Antoun.

Ces modélisations sont de plus devenues matures à un moment où les chercheurs en génétique disposaient d’outils permettant de caractériser individuellement des cellules vivantes. « La convergence de ces technologies nous a permis d’imaginer les innovations que propose Vidium », indique Arnaud Bonnaffoux. Aujourd’hui, la startup propose ses solutions informatiques à des chercheurs et experts des secteurs public ou privé, travaillant au sein de grands groupes industriels ou de laboratoires de recherche (par exemple de l’Inserm ou du CNRS en France).

Une implication scientifique et stratégique d’Inria

Explorer avec l’informatique la dynamique de réseaux génétiques, au sein de laquelle un gène donné interagit avec plus de trois cents autres gènes, qui plus est dans un contexte aléatoire, demande des moyens de calcul conséquents. Vidium s’est donc appuyée sur les compétences d’Inria, en particulier celles de l’équipe Avalon***, afin d’optimiser les algorithmes et les moyens de calcul. « L’implication d’Inria dans notre projet s’est de plus étendue au-delà des aspects scientifiques, complète Sami Bou-Antoun. L’institut nous a apporté un soutien précieux, dans le cadre de son dispositif d’accompagnement à la création de startups, en particulier en finançant le salaire d’un ingénieur en informatique pendant toute l’année 2019, et en apportant une avance de fonds à un moment où nous ne pouvions plus compter sur notre épargne pour financer notre projet ! »

Vidium est aujourd’hui sur le chemin d’un développement économique ambitieux et souhaite démultiplier ses équipes, à Lyon, en France et même à l’étranger, où se trouvent certains clients.

Nous prévoyons d’embaucher des ingénieurs ayant de multiples compétences, en informatique comme en biologie : le succès de Vidium se construit sur la qualité de ses salariés et sur une dynamique interdisciplinaire ! 

concluent Sami Bou-Antoun et Arnaud Bonnaffoux, qui, depuis la création de leur entreprise, incarnent pleinement ces valeurs.  

 


* Unité de recherche mixte CNRS, ENS de Lyon et Inserm, le LBMC travaille sur les bases moléculaires du fonctionnement normal et pathologique des cellules.

** Équipe mixte d'informaticiens et de mathématiciens d’Inria Grenoble Rhône-Alpes et de biologistes de l'ENS de Lyon, commune avec le CNRS, Dracula œuvre à la modélisation mathématique de différents processus liés à "l'hématopoïèse", c’est-à-dire à la fabrication du sang (d'où le nom de l'équipe !).

*** Avalon est une équipe mixte, commune au CNRS, à Inria Grenoble Rhône-Alpes, à l’ENS et l’université de Lyon, spécialisée dans les techniques de calcul haute performance (HPC).