Prix Inria

Julien Mairal, innovateur de l’apprentissage machine

Date:
Mis à jour le 05/12/2023
Honoré par le Prix Inria – Académie des sciences jeunes chercheuses et jeunes chercheurs, Julien Mairal s’est affirmé très tôt comme un pionnier de l’apprentissage machine et de la vision par ordinateur. Ses travaux font la part belle à la pluridisciplinarité et se nourrissent de collaborations issues de divers domaines tels que la génomique, l’astronomie, la robotique, la science des matériaux… Un bel équilibre entre théorie et applications concrètes.
Portrait de Julien Mairal
© Inria

La pluridisciplinarité pour moteur

Julien Mairal affiche des états de service qui feraient rêver bien des chercheurs en fin de carrière. Il a cosigné plus de 100 articles, dont certains sont devenus des références mondiales. Il a obtenu par deux fois des bourses ERC, attribuées avec parcimonie par le Conseil européen de la recherche à des scientifiques d’excellence. Au Centre Inria de l’Université Grenoble Alpes, il dirige Thoth, une équipe-projet d’une trentaine de personnes.

Le Prix Inria – Académie des sciences Jeunes chercheuses et jeunes chercheurs salue ce parcours d’exception, encore riche en promesses pour l’avenir. « C’est une distinction prestigieuse, très visible en France, réagit l’intéressé. Elle reconnaît notamment la diversité de mes travaux : je ne voulais pas m’enfermer dans un seul sujet. »

Objectif : dépasser les limites actuelles de l’apprentissage machine, ou machine learning

Son défi scientifique ? Rendre les algorithmes d’apprentissage moins gourmands en calcul et en données, et atteindre des standards de robustesse et d’interprétabilité nécessaires aux applications scientifiques.

J’essaie de pousser des sujets de recherche fondamentaux vers des applications concrètes, et ainsi d’identifier de nouveaux problèmes théoriques, communs à ces applications. 

Le parcours de recherche de Julien Mairal débute chez Inria : il y effectue sa thèse de 2007 à 2010, pendant laquelle il crée un algorithme d’apprentissage au succès considérable, récompensé dix ans plus tard lors de la conférence phare du domaine. Puis il réalise un postdoctorat sur le prestigieux campus californien de Berkeley et collabore brièvement avec des spécialistes en neurosciences.

Chez Inria, « un environnement porteur et un vrai support »

Biographie express

  • 2005 : diplôme de l’École polytechnique
  • 2006 : master de mathématiques appliquées à l’ENS Cachan 
  • 2010 : doctorat ENS Cachan - Inria (thèse sur l’apprentissage statistique appliqué à la vision artificielle et au traitement d’image)
  • 2011 – 2012 : postdoctorat à l’université de Californie à Berkeley
  • 2012 : recrutement chez Inria
  • 2016 : lauréat d’une bourse ERC Starting Grant
  • 2023 : lauréat d’une bourse ERC Consolidator Grant

À son retour en France en 2012, le jeune chercheur retourne chez Inria, en tant que chargé de recherche à Grenoble. « Je savais que j’y trouverais un environnement porteur et un vrai support pour travailler. »

Julien Mairal intègre l’équipe-projet Lear, spécialisée dans l’apprentissage de modèles visuels à partir de données massives. À peine arrivé, il y cultive la pluridisciplinarité. Par exemple, il entame une collaboration avec des chercheurs en génomique de l’institut Curie et du CNRS Lyon, pour les aider à reconstituer des brins d’ARN après une opération de séquençage qui les "hache" en minuscules morceaux.

En 2015, il publie avec ses collègues une première version de Catalyst, un algorithme qui rend plus performantes certaines tâches de machine learning. Il continuera à le perfectionner jusqu’en 2019. « C’est un résultat important dans ma carrière : Catalyst résout un problème auparavant ouvert concernant l’accélération de nombreux algorithmes, ce qui a eu un impact important. »

Des algorithmes qui font gagner un temps considérable

L’année suivante, Julien Mairal est lauréat d’une bourse ERC du Conseil européen de la recherche ; de quoi financer le recrutement de plusieurs chercheurs et chercheuses qui travailleront à ses côtés. Deux ans plus tard, il devient responsable de son équipe-projet, rebaptisée entre-temps Thoth.

Peu après, il développe avec une doctorante qu’il coencadre l’algorithme SwAV, puis DINO en 2021, dans le cadre d’une collaboration avec Facebook. Tous deux portent sur de l’apprentissage dit "autosupervisé".

On apprend à un système à extraire automatiquement dans des scènes l’information la plus pertinente pour des tâches de reconnaissance visuelle, sans avoir besoin d’annotations manuelles.

Le procédé est bien plus rapide et moins coûteux que la méthode classique, qui soumet au système des millions d’images annotées pour indiquer qu’il s’agit d’une chaise, d’un arbre, d’un enfant, etc.

Sur la piste des exoplanètes

Poursuivant sa quête de pluridisciplinarité, le chercheur entame dans le même temps une collaboration avec des astrophysiciens du CNRS basés à Lyon et Paris. Objectif : améliorer la détection d’exoplanètes, en exploitant les images de grands télescopes avec des algorithmes d’apprentissage machine.

Aujourd’hui, l’agenda de Julien Mairal reste toujours aussi chargé. Il vient de décrocher une deuxième bourse ERC, cette fois pour tenter d’encoder des principes physiques au sein des algorithmes de machine learning afin d'en simplifier et alléger la phase d’apprentissage.

Enfin, il apporte son concours scientifique à Enhance Lab, startup créée en 2022 par un de ses doctorants. « Elle traite par voie logicielle des rafales de photos brutes prises au smartphone, pour générer une vue en haute résolution. »  Un challenge supplémentaire à relever pour ce chercheur passionné.

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