Cordelia Schmid : Grand Prix Inria – Académie des sciences

Date:
Mis à jour le 08/04/2021
Reconnue comme l’une des grandes spécialistes mondiales de la vision par ordinateur, Cordelia Schmid dirige l’équipe-projet Thoth du centre de recherches Inria Grenoble Rhône-Alpes. Ses recherches sont consacrées à la vision artificielle et plus particulièrement à l’interprétation automatique d’images et de vidéos numériques. Ses travaux fondamentaux portent sur la représentation d’images et de vidéos ainsi que sur l'apprentissage visuel permettant de reconnaître des objets, mais aussi des actions et des lieux en se basant sur l'apprentissage à partir de grandes bases d’images et de vidéos. Le Grand Prix Inria-Académie des sciences récompense son parcours exceptionnel dans le domaine de la vision par ordinateur depuis plus de vingt ans.
Cordelia Schmid
© Inria / Photo G. Scagnelli

En 1987, Cordelia Schmid entre à l’université de Karlsruhe et entame un cursus de cinq ans en sciences de l’informatique. C’est lors de son stage de master, effectué à l’Institut National Polytechnique de Grenoble dans le cadre d’un échange ERASMUS, qu’elle décide de se consacrer à la vision par ordinateur et, plus précisément, à la reconnaissance d’objets. « Je me suis posé cette question toute simple : pourquoi est-il si facile pour un être humain de reconnaître un objet, un lieu, une personne dans une image alors que pour l’ordinateur c’est quasiment impossible ? Ce qui m’intéressait, c’était de répondre scientifiquement à cette question. »

Un champ de recherche à défricher

Dès sa thèse, Cordelia Schmid développe une nouvelle forme de représentation d’images permettant la reconnaissance d’objets dans des conditions réalistes (occultation, rotation, déformation). Des travaux déjà très remarqués dans la communauté scientifique. Plus tard, elle élargit ses recherches à l’apprentissage visuel. En combinant les recherches sur la vision par ordinateur et celles sur l’apprentissage de la reconnaissance automatique d’images et de vidéos, Cordelia Schmid devient en quelques années une des spécialistes les plus reconnues dans son domaine.

Depuis 2003, elle dirige une équipe-projet de vingt personnes, au sein d’Inria : le projet Lear, devenu Thoth en 2016. « Cette nouvelle étape a permis de lancer de nouveaux projets et de travailler étroitement avec d’autres chercheurs. À plusieurs, on avance plus vite. »

Au fil de son parcours, Cordelia Schmid a aussi multiplié les expériences internationales, notamment à Oxford, où elle est restée un an comme postdoctorante, puis à Berkeley, où elle se rend régulièrement depuis 2000. « Un chercheur n’a pas vocation à rester enfermé dans son bureau ou son laboratoire. Il aura toujours intérêt à échanger, à dévoiler ses propres travaux pour les confronter à ceux des autres chercheurs, à en recevoir des critiques. Aller voir ce qui se fait ailleurs est essentiel. Surtout si cet ailleurs rassemble les meilleures équipes de recherche au monde. »

Des applications très concrètes

Quand Cordelia Schmid a commencé ses recherches, la vision par ordinateur en était encore à ses débuts. Rien n’était acquis, tout était en gestation. Les techniques de reconnaissance visuelle par ordinateur étaient alors appliquées à des objets très simples parmi des bases de données encore limitées à quelques centaines d’images. « L’évolution a été fantastique. Le domaine de la reconnaissance visuelle par ordinateur a explosé. Aujourd’hui, la recherche porte sur des contenus beaucoup plus complexes, dans des bases de données pouvant contenir cent millions d’images. Ce qui était inimaginable est désormais de l’ordre du faisable.  »

Véhicule autonome, services à distance pour les personnes âgées ou les enfants, géolocalisation à partir d’images et de vidéos mises en ligne : les applications des recherches de Cordelia Schmid sont appelées à se développer. La sécurité, avec la vidéosurveillance, et la santé, par la reconnaissance visuelle appliquée aux maladies, sont parmi les domaines directement concernés par les progrès de la recherche. Les géants du Web, comme Facebook ou Google, sont aussi très intéressés par le déploiement de ces nouvelles technologies de pointe.

La recherche, entre passion et persévérance

Près de vingt ans après avoir soutenu sa thèse, Cordelia Schmid l’affirme : la recherche reste une précieuse source d’enrichissement et d’épanouissement personnel. « On réfléchit en permanence à des projets innovants, on croise des personnes passionnées par ce qu’elles font. On ne s’ennuie jamais. La recherche, plus qu’un métier est une passion. » Elle encourage donc les jeunes chercheurs et chercheuses à « garder le cap sans dévier malgré les doutes inévitables », elle qui « [a] toujours tenu la ligne [qu’elle s’était] fixée, malgré les difficultés. Les récompenses n’arrivent pas du jour au lendemain. Elles sont le résultat d’un long parcours qui ne s’arrête pas avec la reconnaissance de la communauté. »

Témoignages

Jean Ponce

Jean Ponce, responsable équipe-projet WILLOW commune Inria-ENS-CNRS et professeur à l’École normale supérieure et directeur du département d’Informatique de l'ENS

« Les travaux de Cordelia Schmid  ont eu un impact sur la vision par ordinateur. Elle a su démontrer qu’il était possible d’identifier et de décrire des images dans un cadre plus complexe, ce qui était alors très nouveau. »

 

Stéphane Mallat

Stéphane Mallat, chercheur en mathématiques appliquées et professeur au département d’Informatique de l’École normale supérieure (Paris).
       

« Le domaine de la reconnaissance visuelle par ordinateur a explosé depuis les années 2000. Cordelia Schmid fait partie des pionnières à l’origine de cette explosion. Son travail est exceptionnel. Elle s’est investie dans la mise en place d’outils d’évaluation et de comparaison qui ont beaucoup fait avancer ce domaine. »

Bio express

  • 1992 - Après un master en sciences de l’Informatique à l’université de Karlsruhe ; 
  • 1996 - Doctorat en sciences de l’informatique à l’Institut National Polytechnique de Grenoble ;
  • 1996-1997 - Post-doctorante à l’université d’Oxford ;
  • 2004 - Chargée, puis directrice de recherche chez inria ;
  • 2006, 2014 et 2016 - Prix Longuet-Higgins ;
  • 2015 Prix de recherche Humbolt.

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