Qu’est-ce que le design par ordinateur de formes animées ?
Cela consiste à utiliser l’ordinateur et l’informatique graphique pour concevoir des formes tridimensionnelles en mouvement, des personnages, des prototypes industriels, des modèles virtuels scientifiques ou tout autre type de maquette numérique. Rendre les outils de création numérique vraiment intuitifs est un domaine scientifique crucial. Car aussi étonnant que cela puisse paraitre à l’ère du numérique, le papier, le crayon ou l’argile restent les outils préalables privilégiés pour l’ébauche de nouvelles formes, même pour celles destinées à être peaufinées dans un logiciel.
Pourquoi est-ce hors de portée ?
Créer ces nouveaux outils d’expression suppose de concevoir des méthodes centrées sur les utilisateurs, qui s’adaptent à leur capacité créative et non le contraire. Cela impose de nouveaux types de modèles pour les formes en mouvement, capables de répondre de manière intuitive aux gestes d’interaction.
Comment pensez-vous pouvoir y parvenir ?
Nous avons déjà apporté une preuve du concept dans le cadre de mon ancienne équipe-projet Evasion (2003-2011). Nous avions conçu un modèle intelligent qui permettait de dessiner rapidement des arbres réalistes dans des paysages virtuels : leur morphogenèse est imposée par leur silhouette, que l’utilisateur ébauche en 2D à plusieurs résolutions. Les détails, créés en 3D, sont automatiquement répliqués sur l’arbre.
Mon but est d’appliquer ce type d’approche à une variété de domaines. Par exemple pour créer des vêtements : en partant de simples croquis 2D sur des images de personnages, il s’agira de générer leur surface développable 3D, de retrouver leur patron et de les adapter automatiquement à d’autres morphologies. Ma bourse ERC me permet de financer cinq doctorants, cinq postdoctorants, un ingénieur pendant cinq ans et trente mois de séjours de professeurs invités.
Pourquoi vous intéressez-vous à cette créativité virtuelle ?
Pour tout dire, en parallèle de mes études scientifiques, j’ai toujours été passionnée par le dessin et la sculpture. Après mon agrégation de mathématiques, j’ai fait une thèse en informatique graphique. Ce n’est donc pas un hasard si j’explore maintenant les possibilités de l’outil numérique pour offrir une plus grande créativité.
Créer un crayon virtuel expressif pour dessiner en 3D
Dans cet exemple, le créateur de vêtements esquisse un croquis qui est transformé pour habiller un mannequin en 3D - Inria/Evasion
Dans son projet ERC baptisé Expressive, Marie-Paule Cani propose d’utiliser les outils numériques, ordinateurs ou tablettes graphiques, pour ébaucher puis affiner des formes en trois dimensions avec plus de réalisme et de simplicité qu’avec un crayon. Au lieu de recourir aux techniques standard de l’informatique graphique conduisant à des logiciels requérant plusieurs années de formation, elle se propose de développer des modèles dynamiques de haut niveau : des représentations de formes et de mouvements capables de laisser le contrôle à l’utilisateur tout en l’aidant à obtenir le meilleur résultat possible. Pour cela, elle devra marier l’informatique graphique, sous ses composantes géométrie et simulation, avec l’interaction humain-machine et les sciences cognitives.