Créé en mars 2019 à l’initiative de Tamara Ben-Ari (Inrae) et Olivier Berné (CNRS), Labos 1point5 est un collectif qui réunit des femmes et des hommes du monde académique, quel que soit leur statut, issus de disciplines et d’établissements et organismes de recherche très divers, répartis sur l’ensemble du territoire national.
Son objectif : emmener l’ensemble de la communauté de recherche française dans une démarche de transformation axée sur la réduction de son empreinte environnementale. Une démarche accessible à tous les personnels de la recherche, puisque chacun d’entre eux peut intégrer le collectif en s’engageant à donner au minimum 5% de son temps, et ce pour une durée minimale d’un an.
Pour ce faire, le collectif a structuré ses activités en deux parties : un groupement de recherche (GDR) et des équipes indépendantes (une équipe de réflexion et un séminaire).
Un GDR pour mieux comprendre et réduire l'empreinte carbone des activités de recherche
La première activité du GDR est d’analyser et de réduire l’empreinte carbone de la recherche en France. Dirigé par Tamara Ben Ari avec une équipe composée de dix scientifiques et un comité scientifique de cinq personnalités issues d’organismes de renom (Haut conseil pour le climat, CNRS, ADEME et Inserm), il s’est donné pour mission d’analyser, d’une part, l’empreinte carbone de la recherche en termes d’émissions de gaz à effet de serre (GES), et d’autre part d’accompagner une transition des laboratoires de recherche vers des pratiques plus vertueuses.
À ce jour, Labos 1point5 compte plus de 250 membres, 500 laboratoires impliqués dans l’estimation de leur BGES (bilan gaz à effet de serre) et plus de 3500 abonnés à la lettre de diffusion.
Les travaux du GDR s’articulent autour de deux axes : empreinte et transition.
- Axe "empreinte" : Estimer et analyser l’empreinte carbone des laboratoires de recherche en France
L’équipe Empreinte développe GES 1point5, un outil open source et gratuit qui permet aux laboratoires de réaliser de façon autonome un bilan GES de leurs activités avec pour périmètre les données de chauffage et électricité, les déplacements domicile-travail, les voyages professionnels, les achats, les équipements numériques et les véhicules. Dans un deuxième temps, les bilans GES calculés par cet outil permettent d’analyser les émissions de la recherche française dans son ensemble et pour la première fois à l’échelle nationale. « L’idée est d’analyser les bilans GES des laboratoires de recherche en France pour les comparer, comprendre la typologie des émissions de GES. Avec cette compréhension, nous pourrons discuter de scénarios de réduction pertinents pour chaque catégorie de laboratoire », indique Céline Serrano, chargée du réseau des laboratoires en transition.
Les travaux se poursuivent et portent sur l’intégration d’un outil de scénarisation des réductions, l’estimation de l’empreinte des infrastructures de recherche, les impacts environnementaux et l’analyse du cycle de vie (ACV) et des enquêtes locales pour mieux comprendre les contraintes d’un laboratoire dans son écosystème.
- Axe "transition" : Accompagner et faciliter la transition dans les laboratoires de recherche.
L’objectif général est d’explorer les différents dispositifs (sensibilisation, outils financiers comme les quotas ou les taxes, dispositifs incitatifs ou coercitifs) de réduction des émissions de GES dans les laboratoires et les conditions de leur mise en œuvre. Pour cela, le Kit 1point5 décrit les dispositifs proposés et les différents choix de mise en place avec une première phase de test auprès d’un échantillon de laboratoires pilotes.
La suite de ce travail consiste à suivre et accompagner sur un temps long cet ensemble de laboratoires et à déployer cette démarche à plus grande échelle.
Pour compléter ce tour d’horizon des travaux du GDR, l’équipe "enseignement" se focalise sur la production de matériel pédagogique pour enseigner la transition écologique. Elle développe des supports pédagogiques relatifs aux crises et transitions environnementales, avec pour objectif de pouvoir sensibiliser, ou d'aider à sensibiliser, à ces questions. Ces outils sont, pour le moment, dédiés uniquement à l’enseignement supérieur et ont vocation à s’ouvrir, par la suite, à l’enseignement secondaire.
L’équipe "communication & technique" rassemble toutes les activités qui permettent la communication interne et externe du GDR Labos 1point5. Cette équipe permet le bon fonctionnement du collectif en s’appuyant sur des outils numériques libres, éthiques, décentralisés et solidaires. Des journées Labos 1point5 sont également organisées pour permettre de faire un état des lieux des travaux menés au sein du GDR. La dernière a eu lieu le 1er juin 2022 à Sorbonne Université (Paris).
En parallèle du GDR, l’équipe "réflexion" a pour missions de faire vivre et d’articuler une réflexion de fond et d’organiser les débats au sein du collectif et au-delà.
Plus généralement, cette équipe produit des textes et rapports sur des sujets touchant à la question de la transition écologique dans la recherche et dans l’enseignement.
À l’intersection entre le GDR et l’équipe réflexion, Labos 1point5 organise des séminaires mensuels et en ligne (plus d’une centaine de participants et participantes) organisés par cycles thématiques. Depuis 2021, plusieurs cycles ont été organisés : « Décarboner en 2050 », « Technologie et sobriété », « Transmission » et « Éthique et responsabilité ». Tous sont accessibles en replay sur le site de Labos 1point5.
Un changement en profondeur des pratiques de la recherche
Labos 1point5 lancera, en 2023, le réseau des laboratoires en transition. Ouvert à tous les laboratoires de France qui veulent s’engager et transformer leurs pratiques de recherche pour émettre moins de GES, celui-ci veut leur permettre d’échanger sur les bonnes pratiques, les obstacles rencontrés et les solutions possibles.
En effet, l’objectif de Labos 1point5 est la démocratisation de son outil GES 1point5 auprès de tous les laboratoires français, mais aussi la création d’une communauté de laboratoires s’engageant dans une démarche de transition. « Nous travaillons à la création de ce réseau de laboratoires engagés dans des scénarios de réduction de leur empreinte carbone, une communauté qui a besoin de partager difficultés, bonnes pratiques et leviers. À plus long terme, nous souhaiterions que cette démarche infuse dans les autres domaines d’activité de la société. Nous travaillons également à établir des liens à l’international notamment avec les établissements de Suisse et d’Amérique du Nord, très moteurs sur le sujet », explique Céline Serrano.
Inria membre du collectif, au travers du GDR
Depuis mars 2022, Inria fait partie du GDR Labos 1point5 aux côtés du CNRS et de l’INRAE.
Un engagement qui permet à l’institut de renforcer son implication sur les sujets liés à la transition écologique. Cette démarche a été amorcée en octobre 2019 par la publication du rapport MakeSens travaillé par des chercheuses et chercheurs d’Inria traduisant une prise de conscience et la nécessité d’agir à propos des grands enjeux environnementaux (au niveau recherche et empreinte carbone). Un premier pas qui avait été rapidement suivi par la mise en place du "plan Environnement" de l’institut en décembre 2020, constitué de 24 mesures volontaristes pour diminuer son empreinte environnementale.
Désormais, l’intégration d’Inria dans Labos 1point5 permettra de maintenir la dynamique créée pour aboutir à des résultats opérationnels visibles et significatifs en termes de réduction de son empreinte environnementale. Le rôle de l’institut dans le GDR consiste principalement à encourager et faciliter l’insertion des centres de recherche Inria dans le réseau des laboratoires en transition, mais aussi participer à la diffusion du thème du numérique frugal avec des formations, des sensibilisations et des recherches issues de l’institut et pouvant être appliquées dans les autres organismes. Cet engagement d’Inria dans le GDR se concrétise également par la mise à disposition d’une ingénieure de recherche à plein temps. Labos 1point5 a devant lui des challenges comme le passage à l’échelle de la démarche engagée, la pérennisation et le maintien de la dynamique créée et Inria y contribuera activement.
À ce jour, une dizaine de chercheuses et chercheurs d’Inria sont déjà engagés dans Labos 1point5.